La faille du Col d'Ornon
Evolution des faciès du Jurassique  
 

Evolution des faciès du Jurassique dans la zone dauphinoise du Mont Blanc au Pelvoux (Alpes occidentales)

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Évolution des faciès du Jurassique dans la zone dauphinoise du Mont Blanc au Pelvoux (Alpes occidentales)
par JEAN-CLAUDE BARFETY (*) et RENÉ MOUTERDE (**)
Note présentée à la séance du 22 octobre 1929, déposée le 29 octobre 1929, manuscrit définitif reçu le 14 avril 1980.

Mots clés — Jurassique, Lithofaciès, Paléogéographie.
Hautes-Alpes, Savoie, Isère, Haute-Savoie.

Résumé — A partir des résultats d’études récentes au 1/50 000, une vue d’ensemble de la répartition des faciès des zones externes des Alpes au Jurassique est donnée. Des séries réduites du Lias inférieur et moyen existent souvent en bordure des massifs anciens, elles contrastent avec les dépôts plus épais des « bassins » qui les séparent. Certains massifs, Grand Châtelard, Pelvoux... sont recouverts totalement ou partiellement à partir du Domérien, moment où la sédimentation devient plus uniforme. Des mouvements tectoniques sont enregistrés au Lias inférieur et au Toarcien supérieur. Le Bajocien et l’Oxfordien ont été reconnus en de nombreux points.

Jurassic facial evolution between Mont Blanc and Pelvoux massifs
(Dauphinois-zone, Western french Alpes)

Abstract. — A general view of the facies distribution of the Jurassic in the outer zones of the A]pes is given from results obtai¬ned from a recent mapping program (1/50 000 scale). Reduced successions of the Lower and Middle Lias often occur on the margina of ancient massifs, they contrast with the thicker basin-type deposits that separate them. Some massifs e.g. Grand Châtelard, Pelvoux... were completely or partially covered from the Domerian, when the sedimentation became more uniform. Tectonic movements occurred in the Lower Lias and Upper Toarcian. The Bajocian and Oxfordien have also been met in many places.

Le lever en cours des cartes géologiques au 1/50 000 de la région externe des Alpes apporte de nombreuses données nouvelles 1 sur la stratigraphie et la répartition des faciès du Jurassique; elles viennent compléter les études classiques, mais généralement limitées géographiquement, des géologues alpins suisses et français dont on trouvera les noms en bibliographie. En nous appuyant sur l’ensemble de ces données, nous voudrions présenter la disposition et l’évolution des faciès dans la partie nord du domaine alpin externe ou zone dauphinoise au sens large jusqu’au chevauchement pennique frontal.

Au Jurassique, ce domaine comportait des régions subsidentes et des régions à sédimentation plus réduite ou nulle qui coïncident souvent avec les bordures des massifs cristallins externes. Les érosions intenses des zones en relief et les déformations tectoniques accompagnées de déplacements dont - l’importance et la direction sont discutées - rendent impossible une véritable reconstitution paléogéographique. Sur les cartes de répartition de faciès (fig. 1) nous nous sommes contentés de réduire légèrement certains massifs cristallins et de les écarter pour permettre de figurer clairement les dépôts des zones actuellement resserrées par la tectonique alpine.

Avant de suivre la répartition des faciès au cours du temps, il est bon de donner quelques précisions sur les dépôts de bordure des massifs cristallins et les aires subsidentes.

I.— LES AIRES DE SEDIMENTATION.

1) Bordures des massifs cristallins occidentaux (fig. 1). Le massif des Aiguilles Rouges montre sur sa bordure est une série jurassique qui débute seulement au Bajocien moyen [Paréjas, 1922] 2 La bordure ouest est plus difficile à déchiffrer en raison des complications tectoniques dues au chevauchement de la nappe de Morcles, mais il semble maintenant démontré qu’en certains points le Malm calcaire [col de Salenton, Ayrton, 1972] ou le Crétacé supérieur [Pormenaz, Pairis, 1973] sont directement transgressifs sur le Trias réduit.

Le massif du Mont Blanc est limité au Nord-Ouest par un contact tectonique qui le sépare de la zone sédimentaire de Chamonix-col de Balme. A l’Est du massif, une couverture autochtone, discontinue, peu épaisse et débutant au plus tôt à l’Aalénien, a été décrite [Grasmuck, 1961 ; Antoine et al., 1975]. A l’extrémité sud, dans la région du col du Bonhomme-Tête des Fours, le Lias est incomplet, peu épais et souvent gréseux 3 ; les niveaux tendres superposés sont aaléniens ou plus probablement oxfordiens surmontés de barres calcaires du Malm. Les lames cristallines de Roselette, du Lac de la Gitte et de La Penaz sont partout recouverts de calcaires à entroques minces puis de schistes sombres à Ammonites de l’Oxfordien inférieur (Landry) 4 et du Malm-Néocomien [Saint-Gervais 1/50 000, Ménessier, 1976]. La trace de ces écaillages se retrouve loin vers le Sud jusqu’en Maurienne.

La bordure nord du massif Beaufortain-Belledonne porte un Lias réduit mais probablement complet [col des Saisies, Barféty et Mouterde, 1978]. Sa bordure occidentale est marquée par un accident qui amène le plus souvent l’Aalénien ou le Jurassique moyen contre les terrains cristallins. Le Lias n’est connu à l’affleurement qu’aux environs de La Rochette 5 d’Allevard [Barféty et al., 1972] et, à partir de Vizille, sur la bordure ouest du Taillefer, en Valbonnais et Beaumont [Aprahamian, 1968]. Aux environs du dôme de La Mure, la série se réduit et la plus grande partie du Lias est à l’état de calcaire à entroques (calcaire de Laffrey, 20-30 m) 6. Dans l’accident médian de Belledonne, de Beaufort à Séchilienne près de Vizille, malgré l’extrême resserrement des structures, des témoins de séries condensées ont pu être relevés 7.

Le bord est du massif cristallin de Beaufort à l’extrémité septentrionale de Belledonne, présente partout une couverture réduite (20 à 30 m) de grès, calcaire gréseux et schistes ; l’absence de fossiles ne permet pas de lui attribuer un âge précis (Lias et Jurassique moyen ?). En de nombreux points du bord est de Belledonne 8, on est en présence de minces séries de couverture que nous décrirons plus loin cette disposition a pu être exagérée par une forte tectonisation [Barféty, 1976].

Sur la bordure est du Taillefer, d’Oulles à Chantelouve et au Périer des observations récentes [Barféty et al., 1979] prouvent que le Trias, le Lias inférieur et moyen sont absents ou très réduits.

2) Bordures des massifs cristallins orientaux. Au Nord de Saint-Jean-de-Maurienne, la voûte cristalline du petit massif de l’Echaillon montre, sur son flanc est, un placage de calcaire riche en Bélemnites, du Carixien. De même sur le versant sud du Grand Châlelard, le socle ou le Trias porte des brèches et des encroûtements de calcaire fin à Bélemnites du Carixien, surmontés par des schistes domériens. Les versants ouest et nord du même massif montrent un Lias calcaire d’épaisseur modérée (50 m au maximum).

Plus au Sud, dans la Combe de Bélard et sur le flanc est des Grandes Rousses, le Lias calcaire est également peu épais (100 m environ) et devient un peu détritique. En arrivant près de la Romanche (Combe du Ferrand), il s’amincit beaucoup jusqu’à disparaître ; cet amincissement pourrait être dû à des effets de tectonique synsédimentaire comme le long du Taillefer (cf. infra). Près de là, à la Croix de Cassini, P. Bordet [1961] a signalé des « filons sédimentaires » ouverts dans les gneiss et remplis par des calcaires à Bélemnites et Gastéropodes attribués au Lias inférieur.

Sur toutes les bordures du massif du Pelvoux, le Lias présente des réductions d’épaisseur, des lacunes ou des niveaux détritiques plus ou moins développés selon les points.

Dans la région des Deux-Alpes, on note une forte réduction du Lias calcaire 9 et des brèches avec olistolithes dans le Lias schisteux [Barféty et Gidon, 1980]. Au Nord du Pelvoux, sur la bordure méridionale du plateau d’Emparis, on voit le Lias calcaire diminuer d’épaisseur. Il en est de même au Sud de La Grave, à Côte Longue, sous le chevauchement de la Meije. Au Nord-Est du Pelvoux, une série jurassique d’épaisseur modérée et relativement complète affleure entre l’Alpe du Villar d’Arène et le col d’Arsine [P. Gidon, 1954] 10. A l’Est du massif les Jurassiques inférieur et moyen sont rarement préservés, ils prennent alors des faciès bien particuliers calcaires gréseux, spathiques ou conglomératiques, parfois à silex, avec Bélemnites, Arnioceras, etc. 11

En plein cœur du massif, le bord sud du plateau sommital du Mont Pelvoux porte un placage de calcaire siliceux gris, parfois arkosique ou conglomératique, attribué au Lias par analogie de faciès. Au Sud-Est de Vallouise, la petite bande liasique du « synclinal d’Ailefroide » montre des calcaires compacts du Lias inférieur (Hettangien ?) surmontés de schistes avec intercalation gréseuse et conglomératique (Lias moyen ou supérieur). Des niveaux gréseux (Domérien inférieur ?) se retrouvent dans la partie méridionale du Pelvoux (synclinal de l’Aiguille de Morges, Rif du Sap).

Dans la partie ouest du massif du Pelvoux, une bande actuellement très comprimée, qui s’étend de l’Alpe de Venosc jusqu’au Valgaudemar par La Muzelle, Lanchâtra, le col des Marmes et le col de la Vaurze, montre un Lias calcaire généralement réduit à quelques mètres et contenant des niveaux bréchiques, des nodules phosphatés et des Arietites silicifiés ; le Domérien et le Toarcien plus marneux sont coupés de niveaux détritiques assez grossiers (brèches, olistolithes) tandis que des filons clastiques à remplissage de Lias calcaire coupent le socle [Barféty et Gidon, 1980]. Dans sa partie méridionale, cette bande très resserrée tectoniquement, ne contient guère que les séries schisteuses du Doméro-Toarcien c’est seulement près de Villard-Loubière en Valgaudemar qu’on peut observer un Lias calcaire relativement épais.

Par contre, sur la bordure occidentale du massif, il semble que l’on passe assez rapidement (pour des raisons en partie tectoniques) au Lias épais du bassin de Bourg d’Oisans - Col d’Ornon ou de la bordure du Beaumont et du Champsaur. Cependant, localement, des réductions au voisinage du socle sont manifestes : série réduite du Grand Renaud au Sud de Bourg d’Oisans [Reboul, 1960] qui se retrouve encore plus condensée vers le Sud, au Neyrarel, sous le signal de Lauvitel et près de Valsenestre 12.

3) Aires subsidentes. Entre ces massifs cristallins s’étendaient des zones subsidentes où régnait une sédimentation plus importante. Au Nord, la zone sédimentaire de Chamonix s’allonge depuis la frontière suisse (col de La Balme) jusqu’au Sud de Beaufort par le col de Voz et le Mont Joly. Cette bande sédimentaire se prolonge, au Sud de Beaufort, dans « l’accident médian » de Belledonne.

Au centre, la zone sédimentaire de Tarentaise-Maurienne-Dauphiné est divisée en deux par les massifs du Grand Châtelard et des Grandes Rousses; sa partie occidentale, actuellement très resserrée, s’étend depuis Naves, par les cols de la Madeleine, du Glandon et d’Ornon, jusqu’au Bourg d’Oisans et au Périer en Valbonnais ; sa partie orientale, depuis Saint-Jean-de-Maurienne et le pays des Arves jusqu’aux environs de La Grave. Cette zone, à l’origine très étendue, présentant des variations de faciès du Nord au Sud et de l’Ouest vers l’Est, s’est trouvée réduite par des compressions tectoniques à des bandes étroites limitées par des contacts chevauchants soulignés par des écailles de Cristallin, de Houiller et de Trias. Au voisinage de ces contacts, le Lias présente souvent des réductions d’origine sédimentaire (Petit-Cœur, Doucy, La Chambre, Saint Etienne-de-Cuines, Le Glandon et, plus à l’Est, Aigueblanche, Lac du Loup, Montvernier 13, Saint-Sorlin d’Arves, Montagne des Crevasses au Nord du plateau d’Emparis). Entre les Arves et la Romanche, la stratigraphie déjà en partie reconnue par R. Barbier [1956], a été bien élucidée, avec la collaboration de R. Rivoirard et P. Petiteville, par la découverte d’Ammonites dans tous les étages.


Fig. 1. A. Répartition schématique des faciès à l'Hettangien
1 : massifs cristallins ; 2 : zones internes ; 3 : séries calcaires (Hettangien à Carixien) ; 4 : séries réduites ; 5 : lacune ;
6 a : séries argileuses (Domérien-Toarcien) ; 6 b : alternances argile et calcaire (Hettangien) ; 7 : détritique ;
8 : tectonique synsédimentaire ; 9 : limite sud de l'Aalénien argileux ; 10 : présence de Malm.

Al : Albertville ; Av : Allevard ; Be : Beaufort ; Bm : Bourg Saint-Maurice ; Bo : Bourg d'Oisans ; Br : Briançon ; Ch : Chamonix ;
CG : Col du Glandon ; CM : Col de la Madeleine ; CO : Col d'Ornon ; G : Grenoble ; LG : La Grave ; Mo : Montmélian ; Mou : Moutiers ;
Na : Naves ; OX : présence de Malm (Oxfordien) : Sc : Saint-Christophe en Oisans ; Sj : Saint-Jean de Maurienne ; Vi : Vizille.

II. — L’ÉVOLUTION DES FACIÈS.

HETTANGIEN (= base du « Lias calcaire ») (fig. 1 A).

Au Nord, dans la zone sédimentaire de Chamonix, il est caractérisé par des marnes et calcaires argileux épais (50 à 100 m) à Ammonites pyriteuses. Toutes les zones de l’étage y sont représentées [Les Arandélys, Paréjas, 1922; Sud-Est du Mont-Joly, Barféty et Mouterde, 1978].

A l’Ouest de Belledonne, l’étage est connu seulement à Allevard (20 m) et dans la région de Vizille (50 m ?) sous forme de calcaire argileux à passées crinoïdiques.

Au Sud-Ouest, il est représenté, sur la bordure occidentale du Taillefer, par des calcaires bioclastiques et gréseux, riches en Lamellibranches [gisement de Côte Dure, L. Moret, 1958] ; il se poursuit en Beaumont, Valbonnais et Champsaur (10 m à l’Esparcelet). L’abondance des Lamellibranches et des Crinoïdes suggère une mer peu profonde. Sur le dôme de La Mure, l’Hettangien est absent, bréchique ou très réduit.

Sur la bordure nord de Belledonne, au col des Saisies et sur la bordure nord-est, entre Saint-¬Guérin et le col du Pré, une mince série calcaréo-marneuse peut être attribuée en partie à l’Hettangien.

A l’Ouest du col de La Madeleine et en divers autres points de la bordure est de Belledonne, affleurent des calcaires peu épais à Lamellibranches. Au Rieu Blanc, à l’Est des Grandes Rousses, ce sont des calcaires cristallins, lumachelliques, à Rhyn¬chonelles et Schlotheimia.

Par contre, à Doucy, au Nord du col de La Madeleine, et au Sud de l’Arc, dans le torrent du Glandon, un ensemble plus épais (20-25 m) de calcaire argileux et de marnes a donné des faunes de Schlotheimia pyriteuses. Les alternances de calcaire argileux et de schistes noirs se retrouvent de façon assez constante, à la base du Lias calcaire, dans une bonne partie de la zone sédimentaire de Maurienne-Dauphiné jusque vers Bourg d’Oisans et La Grave (30-50 m au Mont-¬Falcon et à la Cime des Torches). Vers le Sud-Est, des passées crinoïdiques se développent lorsqu’on approche de La Grave.

Sur les bordures du Pelvoux, l’Hettangien manque ou est représenté par des calcaires gréseux (15-20 m au Diable au Sud-Est des Deux Alpes) ou compacts généralement réduits (col d’Arsine : 4-5 m, Vallouise : 3-4 m, Le Vet au Sud du Périer : 2 m, Grand Renaud : 2-3 m). Il s’agit le plus souvent de dépôts peu profonds à Lamellibranches, Gastéropodes et même Polypiers (Grand Renaud).


Fig. 1. A. Répartition schématique des faciès du Sinémurien au Carixien
1 : massifs cristallins ; 2 : zones internes ; 3 : séries calcaires (Hettangien à Carixien) ; 4 : séries réduites ; 5 : lacune ;
6 a : séries argileuses (Domérien-Toarcien) ; 6 b : alternances argile et calcaire (Hettangien) ; 7 : détritique ;
8 : tectonique synsédimentaire ; 9 : limite sud de l'Aalénien argileux ; 10 : présence de Malm.

Al : Albertville ; Av : Allevard ; Be : Beaufort ; Bm : Bourg Saint-Maurice ; Bo : Bourg d'Oisans ; Br : Briançon ; Ch : Chamonix ;
CG : Col du Glandon ; CM : Col de la Madeleine ; CO : Col d'Ornon ; G : Grenoble ; LG : La Grave ; Mo : Montmélian ; Mou : Moutiers ;
Na : Naves ; OX : présence de Malm (Oxfordien) : Sc : Saint-Christophe en Oisans ; Sj : Saint-Jean de Maurienne ; Vi : Vizille.

SINÉMURIEN — CARIXIEN (partie moyenne et supérieure du Lias calcaire) (fig. 1 B).

Au Nord, dans la zone de Chamonix-Mont-Joly, les calcaires en dalles minces se chargent d’un fin matériel détritique dont la teneur augmente en direction du col de Balme où ils passent à des calcaires gréseux (Sinémurien inférieur) et à des quartzites (Lotharingien), faciès qui sont ceux de la nappe de Morcles; des Bélemnites sont fréquentes dans la partie supérieure (Carixien).

Aucun dépôt n’est connu sur les bordures du Mont Blanc. Toutefois, à son extrémité sud-est, au col du Bonhomme, quelques mètres de calcaires à Arietites sont recouverts par les « grès singuliers » d’âge discuté (Lias moyen ?) mais qui contiennent parfois de grandes Bélemnites.

En Beaufortain, les dépôts sont réduits ou absents. Ils se développent à partir de la vallée de 1’Isère (bassin d’Aigueblanche; 20 m environ au col de La Madeleine) et surtout au Sud de l’Arc aussi bien dans la vallée des Villards qu’aux environs de Saint-Jean-de-Maurienne et du Bourg d’Oisans.

Le Sinémurien inférieur est représenté par des bancs ou des dalles épaisses de calcaires à grandes Ariétites. Le Lotharingien est souvent plus argileux et le Carixien formé de bancs épais, plus compacts, à patine rousse, avec localement de grandes Bélemnites, Dans la zone Maurienne-Dauphiné, à l’Ouest, à Saint-Colomban-des-Villards, au col du Glandon et à Grand Maison, le Lias calcaire ne dépasse pas 200 m et se réduit à moins de 50 m au voisinage des massifs anciens (Belledonne, Grand Châtelard…) ; l’impression de grande épaisseur est due surtout aux redoublements tectoniques.

A l’Est, aux environs de Saint-Jean-de-Maurienne et dans le pays des Arves, les épaisseurs sont plus fortes (300-400 m) et les fossiles un peu moins rares. La puissance de la série atteint son maximum sur la transversale Grandes Rousses-Aiguilles d’Arve et reste élevée dans le « bassin » de Bourg d’Oisans (300-500 m). On observe des réductions à l’approche des massifs anciens, aussi bien aux environs de Saint-Jean-de-Maurienne (série très réduite au col du Chaussy au Nord-Est et de la couverture du massif du Grand Châtelard) qu’au voisinage des Grandes Rousses et du Pelvoux.

La bordure nord de ce dernier présente des diminutions d’épaisseur et des lacunes (plateau d’Emparis, Côte longue, le Diable, Tête Moute...). Mais au Puy Golèfre, les calcaires fossilifères ont plus de 100 m [Barbier, 1954]. En ce point comme à Tête Moute, le Carixien semble plus largement développé, ce qui correspond sans doute à une tendance transgressive avec subsidence plus marquée pendant ce sous-étage.

Au Nord-Est du massif, au col d’Arsine, on a encore 50 m de calcaire marneux ; mais à l’Est il n’y a plus que quelques mètres de calcaire gréseux, parfois à silex, avec Ariétites ou Bélemnites. Il en est de même sur les bordures méridionales ou occidentales (étroite bande tectonisée allant de l’Alpe de Venosc à Villard-Loubière par le col de La Muzelle) alors que, plus à l’Ouest, les séries du Grand-Renaud Lauvitel — Valsenestre montrent des dépôts calcaréo-marneux un peu plus épais. En plusieurs points [Est Taillefer, Vallée de La Muzelle, Deux Alpes, Barféty et Gidon, 1980; Beaumont, Gidon et Aprahamian, 1980] les réductions d’épaisseur s’accompagnent de discordance et d’intercalation d’olistolithes, preuves d’activité tectonique synsédimentaire.

Sur la bordure occidentale de Belledonne, l’ensemble Sinémurien-Carixien n’est présent, au Nord, que de façon discontinue, pour des raisons surtout tectoniques ; les épaisseurs sont modérées à La Rochette (100-200 m), un peu plus fortes à Allevard (250 m). Elles sont plus fortes encore au Sud-Ouest, dans la région de Vizille (300 m), et en Valbonnais. C’est seulement autour du dôme de La Mure que les calcaires argileux sont remplacés par des calcaires crinoïdiques (20-30 m). L’absence totale de Gryphées dans ce Lias calcaire est probablement l’indice d’une profondeur des dépôts nettement plus forte que celle de la plate-forme calcaire de la bordure du Massif-Central ou au Sud du Mercantour.


Fig. 1. A. Répartition schématique des faciès aux Domérien, Toarcien (et Aalénien-Jurasique supérieur)
1 : massifs cristallins ; 2 : zones internes ; 3 : séries calcaires (Hettangien à Carixien) ; 4 : séries réduites ; 5 : lacune ;
6 a : séries argileuses (Domérien-Toarcien) ; 6 b : alternances argile et calcaire (Hettangien) ; 7 : détritique ;
8 : tectonique synsédimentaire ; 9 : limite sud de l'Aalénien argileux ; 10 : présence de Malm.

Al : Albertville ; Av : Allevard ; Be : Beaufort ; Bm : Bourg Saint-Maurice ; Bo : Bourg d'Oisans ; Br : Briançon ; Ch : Chamonix ;
CG : Col du Glandon ; CM : Col de la Madeleine ; CO : Col d'Ornon ; G : Grenoble ; LG : La Grave ; Mo : Montmélian ; Mou : Moutiers ;
Na : Naves ; OX : présence de Malm (Oxfordien) : Sc : Saint-Christophe en Oisans ; Sj : Saint-Jean de Maurienne ; Vi : Vizille.

DOMERIEN (fig. 1 C).

La sédimentation devient beaucoup plus marneuse et il y a transgression partielle sur certains massifs anciens (Grand Châtelard, Pelvoux, etc.). Toutefois l’érosion enlève plus activement ces roches tendres et les témoins de ces dépôts ont souvent disparu sur les bordures et probablement aussi sur les massifs. Il en sera de même au Toarcien et à l’Aalénien.

Au Nord, dans la zone de Chamonix, les apports finement sableux persistent. Dans le Beaufortain, la sédimentation est toujours nulle ou réduite. Elle ne devient importante qu’au Sud de l’Isère et surtout au Sud de l’Arc : schistes ardoisiers à Amalthées et nombreux Phylloceras exploités dans la vallée des Villards (200 m), schistes et calcaires à patine rousse de Saint-Sorlin-d’Arves (Le Corbier, 200-300 m) et de Mizoën au Nord du lac du Chambon (200 m), marnes sableuses et plaquettes calcaires bicolores à patine brun-roux des environs de Saint-Jean-de Maurienne (200-300 m). Quelques bancs calcaires s’individualisent parfois à la base et la partie supérieure est généralement plus calcaire ; la pyrite abondante partout est souvent concentrée en nodules. La faune constituée uniquement de Céphalopodes et la fréquence relative des Phylloceras à Saint-Colomban-des-Villards suggèrent une large ouverture océanique.

En bordure du Pelvoux, les faciès varient rapidement. Au col d’Arsine, le Domérien n’a pas été caractérisé. Sur les bordures sud-est et sud du massif (Ailefroide, Aiguille de Morges, Valgaudemar...) des intercalations gréseuses ou conglomératiques sont fréquentes. Au Sud et au Sud-Ouest, règnent généralement des schistes et calcaires marneux tendres et bicolores à patine rousse. Plus à l’Ouest, la bande Grand Renaud-Signal de Lauvitel présente au contraire des calcarénites peu épaisses.

Sur la bordure occidentale de Belledonne, on retrouve une série épaisse de marnes et calcaire marneux tendre gris clair (La Rochette : 50 m ? Allevard : 200 m). A Vizille, on a des calcaires marneux bicolores à patine brun roux.

TOARCIEN (fig. 1 C).

Souvent difficile à distinguer du Domérien, il n’est bien connu que dans les zones subsidentes (200-300 m).

Au Nord, dans la zone de Chamonix, le faciès de calcaire finement gréseux du Domérien se poursuit.

Plus au Sud, du col de La Madeleine au col du Glandon et aux environs de Saint-Sorlin-d’Arves, l’étage comprend des marno-calcaires, qui se chargent de fins éléments détritiques et prennent un faciès proche de celui du Bajocien. Dans le reste de la zone Maurienne-Dauphiné, c’est un ensemble de schistes calcaires et de marno-calcaires mal lités (200-300 m), souvent plus tendre à la base et un peu plus calcaire dans la partie moyenne. La partie supérieure est finement sableuse près de Saint-Jean-¬de-Maurienne, plus calcaire dans la région de La Grave.

Sur les bordures orientale et méridionale du Pelvoux, le Toarcien n’a pu être caractérisé ; quelques schistes à intercalations détritiques pourraient éventuellement lui être rapportés. Au Sud-Ouest du massif il est représenté généralement par des calcarénites ou des schistes peu épais. Mais au Sud des Deux-Alpes, on a pu mettre en évidence une tectonique synsédimentaire avec formation de brèche et même d’olistolithes [Barféty et Gidon, 1980]. Il en est de même aux abords du col d’Ornon [Barféty et al., 1979] où des conglomérats liés aux olistolithes ont été datés avec précision du Toarcien supérieur, ainsi qu’en Beaumont [Gidon et Aprahamian, 1980].

Sur la bordure occidentale de Belledonne, c’est un ensemble de calcaire marneux brun-noir, parfois assez compact (150 à 200 m). Près de La Rochette, la série est peu épaisse et présente des intercalations de calcaire crinoïdique et de niveaux à oncholithes qui indiquent une faible profondeur des dépôts.

Les faciès marno-calcaires sont connus au Sud de Vizille, en Beaumont et Champsaur; le Toarcien inférieur présente des niveaux à laminites sur la bordure sud-ouest du Taillefer.

Sur la bordure est du dôme de La Mure, le long du lac de Laffrey, une tectonique synsédimentaire avec conglomérats et olistolithes d’âge probablement toarcien a été mise en évidence il en est de même au Nord, à Fau-Laurent près de Séchilienne, dans le prolongement de l’accident médian de Belledonne [Barféty et al., 1970].

Ainsi, le Toarcien (plus précisément le Toarcien supérieur au col d’Ornon) se présente dans la région ouest du Pelvoux et du Taillefer comme une période d’activité tectonique. Le passage de la sédimentation calcarénitique réduite au régime marno-calcaire, à la fin du Toarcien moyen, sur le dôme de La Mure, en est peut-être une conséquence.

Dans l’ensemble des aires sédimentaires, la faune, formée essentiellement de Céphalopodes accompagnés de Posidonies, semble de type pélagique et indique des communications faciles avec la Mésogée.

AALÉNIEN.

L’Aalénien, connu presque uniquement dans les zones subsidentes, est très uniforme série épaisse de schistes argileux à nodules siliceux ou pyrito-siliceux qui contiennent parfois des Ammonites des différentes zones de l’étage associées à des Posidonies. Sa base contient localement des niveaux calcaires.

Ce faciès, très constant, est connu depuis Chamonix et le Sud-Est du massif du Mont Blanc jusqu’à la bordure nord du Pelvoux (Côte Longue). Cependant il n’a pu être caractérisé en bordure du Cristallin de Beaufort. On le retrouve sur toute la bordure occidentale de Belledonne avec des nodules siliceux moins compacts, plus friables. Il est connu dans l’accident médian et se poursuit au Sud-Ouest jusqu’au Sud de Laffrey.

A partir de La Mure, au contraire, les dépôts se chargent en carbonates et la barre de calcaire marneux compact de la zone à Opalinum, bien connue dans la région de Gap-Serre-Ponçon, s’individualise progressivement [Aprahamian, 1968].

Sur les bordures du Pelvoux, l’Aalénien n’a été caractérisé qu’au Nord-Est, dans la région du col d’Arsine (50 m de schistes argileux) et aux environs du col d’Ornon.

Le développement d’un faciès essentiellement argileux et siliceux sur la plus grande partie de l’aire sédimentaire traduit un changement du dynamisme de la précipitation des carbonates peut-être liée à une modification climatique ou bathymétrique. La faune de Céphalopodes, associée localement à des Posidonies montre des influences mésogéennes car les Graphocératidés sont accompagnés d’Hammatocératidés et Phyllocératidés.

DOGGER.

Ses dépôts ne sont conservés que dans des régions assez limitées.

Sur les bordures sud-est des massifs des Aiguilles Rouges et du Mont Blanc, le Bajocien est représenté par quelques bancs de calcaire siliceux ou échinodermique. En Tarentaise, à Naves et à Doucy, on peut lui attribuer des calcaires gréseux. Il est bien daté, sous le même faciès, au Nord-Est du col de La Madeleine.

En Maurienne et Dauphiné, le Bajocien est connu seulement dans deux bandes synclinales de calcaire sableux alternant avec des schistes tendres ; l’une au Nord des Deux Alpes, l’autre au Nord de La Grave qui a donné de rares Ammonites du Bajocien moyen.

En outre, des affleurements plus discontinus sont conservés le long du chevauchement du flysch des Aiguilles d’Arves, depuis Saint-Jean-de-Maurienne jusqu’au col d’Arsine ; il s’agit toujours d’alternances de schistes marneux, de marnes et de calcaires sableux souvent micacés (200 m). Près du col de Martignare, les faunes indiquent le Bajocien supérieur et le Bathonien inférieur; au col d’Arsine l’ensemble du Bajocien a été daté.

Le Dogger n’a pas été caractérisé sur les bordures orientale et méridionale du Pelvoux, mais à l’Ouest, au Grand-Renaud, il est représenté par des calcarénites et dans la bande Lauvitel-Valsenestre par des calcaires lités.

Le Bajocien est mieux connu et bien développé sur toute la bordure occidentale de Belledonne. Prés de La Rochette, une masse de calcaires siliceux (20 m) du Bajocien inférieur et moyen forme le relief de la montagne de La Table; les bancs calcaires de base sont datés de la sous-zone à Discites. La bordure orientale du Grésivaudan entre Allevard et Grenoble, longtemps désignée sous le nom de « collines liasiques », est en fait formée de calcaires schisteux finement gréseux qui ont donné une rare faune du Bajocien moyen.

Entre Laffrey et La Mure, le faciès calcaréo-sableux s’enrichit en argile.

Il faut souligner la constance des apports détritiques fins au Bajocien sur la plus grande partie de l’aire de sédimentation, ce qui correspond sensiblement à la répartition des faciès argileux de l’Aalénien. La faune, avec la fréquence des Phylloceras et Lytoceras, montre la persistance des influences mésogéennes.

MALM (fig. 1 C).

L’Oxfordien, formé de calcschistes sombres ou de schistes à petits nodules calcaires contenant parfois de petites Ammonites pyriteuses est maintenant mieux connu grâce aux déterminations de R. Enay. Ces couches tendres n’ont été conservées que lorsqu’elles sont protégées par les calcaires du Kimméridgien-Tithonique dont les bancs supérieurs contiennent localement des Calpionelles. C’est le cas au Sud-Est des Aiguilles Rouges, au col des Posettes, au Sud du Mont Blanc (Tête sud des Fours), en Beaufortain (de Roselette au Roc Marchand), au col de La Madeleine et au-dessus de Montvernier (Nord-Est de Saint-Jean-de-Maurienne).

Sur la bordure sud-est du Mont Blanc, il y a lacune du Callovo-Oxfordien sous une transgression de l’ensemble Oxfordien supérieur-Tithonique.

Le long du chevauchement de la zone du flysch des Aiguilles d’Arves, on retrouve, de façon discontinue, depuis Saint-Jean-de-Maurienne jusqu’à la bordure du Pelvoux (col d’Arsine), des marnes noires et calcaires marneux tendres, fossilifères au col Lombard (Oxfordien inférieur et moyen), recouverts par des calcaires du Malm supérieur.

Sur la bordure orientale du Pelvoux, un ensemble calcaréo-argileux est daté du Bathonien, Callovien et Oxfordien alors qu’à l’Ouest, au Grand Renaud et dans la bande Lauvitel-Valsenestre, l’Oxfordien marneux supporte des calcaires du Malm supérieur.

CONCLUSIONS.

Cette présentation des faciès du Jurassique de la zone externe des Alpes n’est qu’une esquisse qu’il faudra compléter et préciser. Le principal effort a porté jusqu’ici sur l’établissement des séries stratigraphiques locales dont la corrélation est parfois délicate en raison de la rareté des faunes et des complications tectoniques. Pour le Lias, on aperçoit une opposition assez nette entre les zones subsidentes et les bordures des massifs cristallins actuels qui cependant portent localement des dépôts réduits, indices de leur submersion partielle. A partir du Domérien ou du Toarcien, les dépôts tendent à s’uniformiser et à gagner sur les massifs ; ceci est encore plus net à l’Aalénien. Pour le Jurassique moyen et supérieur, l’ampleur des érosions empêche toute reconstitution précise.

L’absence presque totale de fossiles des groupes autres que les Céphalopodes nous prive d’indications bathymétriques. En outre, les accidents tectoniques, localisés souvent aux secteurs où varient à la fois les faciès et la compétence des roches, compliquent la tâche du stratigraphe aux points, même où il aurait besoin de plus de précisions.


Notes.

1. Les feuilles de Domène, Vizille, Montmélian, La Grave, Saint-Jean-de-Maurienne, ont déjà été publiées on trouvera dans leurs notices des informations détaillées. Pour les trois premières, les résultats essentiels stratigraphiques et tectoniques ont fait l’objet d’une note synthétique [Barféty, Debelmas et Mouterde, 1972]. Les feuilles de La Rochette, Bourg-Saint-Maurice, Moutiers, Chamonix, Saint-Christophe-en-Oisans, La Mure sont on cours d’impression ou d’élaboration, ce qui nous amènera à donner plus de précisions sur les régions correspondantes. Les feuilles Orcières et Saint-Bonnet, réalisées par J. Debelmas et M. Gidon, seront publiées prochainement.
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2. Cette série, transgressive soit sur le Houiller au col des Posettes, soit sur le Cristallin à l’Aiguille du Belvédère, comprend des calcaires siliceux et échinodermiques (2-3 m) à nodules ferrugineux et faune du Bajocien moyen et supérieur, des calcschistes sombres (Oxfordien) et des calcaires fins dolomitisés par places à très rares Calpionelles (Esso-Rep, 1988-69, inédit).
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3. Dans la région du col du Bonhomme - Tête-des-Fours, au-dessus du Cristallin, le Trias réduit (quartzite et dolomie) ou le Sinémurien (calcaire marneux peu épais à Ariétites) sont recouverts par les grès singuliers dont l’âge est discuté (Lias moyen ou bien compris entre le Lias intérieur et le Lias supérieur voire même le Dogger). Ces « grès singuliers » sont clairs, fins, à crachées de galets roulés rubéfiés et montrent parfois des Bélemnites de grande taille ; ils passent vers le haut à des plaquettes gréseuses échinodermiques (Tète nord des Fours).
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4. Toutes les déterminations des faunes oxfordiennes ont été faites par R. Enay que nous remercions vivement.
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5. Aux environs de la Rochette, affleure une série calcaire (100 à 200 m ?) formée de gros bancs où le Lotharingien et le Carixien ont été reconnus (Asteroceras suevicum, Angulaticeras lacunoides, Aegoceras sp., grandes Bélemnites) surmontée par un Domérien et un Toarcien marno-calcaire (100 m) dans leur partie supérieure se développent quelques bancs de calcaire à entroques et un niveau à oncholithes. Les schistes argileux de l’Aalénien à rares nodules siliceux sont datés des zones à Murchisonae et à Concavum par des récoltes anciennes et récentes d’Ammonites (V. Paquier, Pillet...). Le faciès se poursuit à la base du Bajocien avec faune de la sous-zone à Discites au-dessus viennent des sédiments marno-gréseux épais, à la partie inférieure desquels ce développent localement une dizaine de mètres de calcaire siliceux formant relief (massif de la Table).
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6. Le dôme de La Mure porte une série peu épaisse de calcaire biodétritique et crinoïdique (calcaire de Laffrey, 20 à 80 m Sinémurien à Toarcien inférieur) qui passe assez vite latéralement aux séries épaisses. Ainsi à l’Ouest, entre le Mollard et Monteynard, le Carixien est calcaréo-marneux (20 m environ) et au Sud, dans le Beaumont, des bancs de calcaires à entroques sont connus dans les séries épaisses du Lotharingien et du Carixien [cf. Sarrot-Reynaud, thèse, 1961].
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7. Ainsi au col de La Bathie, le Lias est représenté seulement par des grès et des calcaires à entroques et Bélemnites surmontés par un Aalénien schisteux à nodules. Au-dessus de Cevins, le Lias inférieur et moyen n’a que quelques mètres.
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8. Dans la coupe du col de La Madeleine, signalée déjà par R. Barbier, nous avons pu caractériser, sur quelques dizaines de mètres, l’Hettangien, le Sinémurien et le Carixien. Que1ques décimètres d’encrinite représentent le Domérien et le Toarcien inférieur (?), les marnes sus-jacentes sont toarciennes et les schistes noirs à nodules non calcaires aaléniens.
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9. A l’Est de l’Alpe de Venosc, dans la région du Diable, de Tête Moute et de Serre Pallas, I’Hettangien ne dépasse pas 20 m de calcaire gréseux et microconglomératique avec faune d’Alsatites, Waehneroceras et Schlotheimia ; le Sinémurien inférieur épais de 10 à 15 m s’achève avec un niveau à nodules phosphatés et encroûtements ferrugineux terminé par une surface durcie les derniers décimètres ont donné une faune importante d’Ammonites de la zone à Semicostatum à laquelle sont associées peut-être quelques formes lotharingiennes [cf. Termier et Kilian, 1893]. Le Lotharingien sus-jacent n’est représenté que par 10 m de calcaire marneux à faune d’Echioceras. Le Carixien débute avec des niveaux à Uptonia (10 à 15 m) mais prend une grande épaisseur dans sa partie moyenne (plus de 100 m) avec Acanthopleuroceras, Tropidoceras et des niveaux à Inocerames.
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10. La coupe (revue par J. Debelmas et J. C. Barféty) comprend calcaire massif gris clair (4-5 m) attribué à l’Hettangien - calcaire gris spathique (20 m ?) à faune d’Ammonites du Sinémurien (z. à Bucklandi et Semicostatum) et du Carixien inférieur (Platypleuroceras sp.) - un peu plus haut, calcaire gris-bleu (30-40 m) en gros bancs avec lits gréseux à patine ocre et grandes Bélemnites représentant le Carixien ou l’ensemble du Lias moyen - schistes argileux à éclat gris (50 m) avec Ludwigella gr. cornu de l’Aalénien - calcaire plus ou moins marneux à faune du Bajocien inférieur, moyen et supérieur (100 m) - calcschistes et schistes noirs à petits nodules calcaires attribués au Bathonien-Oxfordien.
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11. Aux Têtes de Sainte-Marguerite, le Lias n’est représenté que par des calcaires fins en dalles avec intercalation d’un banc massif, gréseux, spathique et conglomératique avec silex et croûte siliceuse, contenant des Bélemnites Arietites sp. et Arnioceras du Sinémurien inférieur. Ces calcaires sont surmontés par des calcaires gréseux en plaquettes avec intercalations schisteuses d’âge imprécis et par des schistes argileux datés du Bathonien-Oxfordion. A la crête des Grangettes - dôme du Monetier, des grès quartzeux, des calcaires gréseux parfois à silex et des calcaires marmoréens (5-80 m) contiennent des Bélemnites, Crinoïdes, Lamellibranches et Polypiers ils sont surmontés par un ensemble calcaréo-argileux et schisteux où l’on a recueilli Reineckeia sp. et Phylloceras tortisulcatum qui indiquent le Callovien et l’Oxfordien.
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12. Tout le Lias ne dépasse pas ici 50-60 m, mais les calcaires lités du Jurassique moyen et les marnes à nodules de l’Oxfordien se développent et ont pu être bien datés (J. C. Barféty et J. Debelmas). Un peu à l’Ouest, sur la crête allant de la Tête des Chétives au Vet, le Lias calcaire reparaît bien daté (Hettangien à Carixien> et au Pic Vert on observe 2 m d’Hettangien, 5 à 6 m de Sinémurien suivis par des calcschistes (avec rares bancs de calcaire à la base) qui représentent le Lias moyen et supérieur.
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13. Dans l’unité orientale du col de Chaussy au Nord de Montvernier, le Lias calcaire est très réduit (10-20 m) et comprend un niveau de brèches à Ammonites sinémuriennes Arnioceras sp.
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Bibliographie sommaire

On trouvera des références complémentaires dans les articles marqués d’un astérisque (*).

* ANTOINE P., PAIRIS J. L. et PAIRIS B. (1975). — Quelques observations nouvelles sur la structure de la couverture sédimentaire interne du Mont Blanc, entre le col Ferret (frontière italo-suisse) et la Tête des Fours (Savoie, France). Géol. alpine, t. 51, p. 5-23.

ANTOINE P. et LANDES P. (1976). — Précisions nouvelles sur l’extension du domaine helvétique en Savoie, à l’arrière de l’axe cristallin Belledonne-Mont Blanc. Eclogae geol. helv., 69, 2, p. 403-418.

APRAHAMIAN J. (1968). — Étude géologique des montagnes du Beaumont et de La Salette (Isère). Thèse 3e cycle, Grenoble, 108 p.

AYRTON S. (1972). — Sur la prolongation de la nappe de Mordes en France. Eclogae geol. helv., 65, 2, p. 821-826.

BARBIER R. (1948). — Les zones ultradauphinoise et sub-briançonnaise entre l’Arc et l’Isère. Thèse. Mém. Serv. Carte géol. France, 291 p.

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BARBIER R. (1958). — Précisions nouvelles dans la coupe du col de La Madeleine (Savoie). C. R. somm. Soc. géol. France, p. 387-388.

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* BARFETY J. C., DEBELMAS J. et MOUTERDE R. (1972). —Caractères stratigraphiques, paléontologiques et structuraux du Jurassique inférieur et moyen des bordures ouest et sud-est du massif de Belledonne (Dauphiné). Feuille à 1/50 000 Montmélian, Doméne et Vizille. Géologie alpine, t. 48, p. 61-86.

* BARFETY J. C. et MOUTERDE R. (1978). — Présence d’Hettangien fossilifère dans le massif du Mont Joly (Megève, Haute-Savoie). Implications stratigraphiques et conséquences structurales. C. R. Ac. Sc., Paris, t. 287, p. 113-116.

BARFETY J. C., GIDON M., LEMOINE M. et MOUTERDE R. (1979). Tectonique synsédimentaire liasique dans les massifs cristallins de la zone externe des Alpes occidentales françaises la faille du col d’Ornon (Alpes occidentales), C. R. Ac. Sc., Paris, t. 289, p. 1207-1210.

BARFETY J. C. et GIDON M. (1980). — Fonctionnement synsédimentaire liasique d’accidents de socle dans la partie occidentale du massif du Pelvoux (région de Venosc, Isère). Bull. B.R.G.M. (à paraître).

BORDET P. (1961). — Particularités géologiques du « synclinal médian dans le Sud du massif des Grandes Rousses.


(*) B.R.G.M., Service géologique national, 18, rue du Général Champon, 38100 Grenoble.
(**) Facultés catholiques de Lyon et Centre de paléontologie stratigraphique et paléoécologie associé au C.N.R.S. (LA 11), 25, rue du Plat, 69288 Lyon Cedex 1.

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